Laurence Ligier, France-Philippines

Laurence Ligier est la fondatrice et directrice de l’association Caméléon qui soutient, aux Philippines, les enfants victimes d’abus sexuels et de grande pauvreté.

« Très jeune, j’ai voulu donner un sens à ma vie en allégeant la souffrance des plus démunis. À 20 ans, j’ai effectué ma première mission humanitaire aux Philippines. Après un premier mandat de deux mois, puis un second, je suis partie une année et c’est pendant cette période que j’ai ressenti le véritable déclic pour l’humanitaire et le développement international. En immersion totale à la campagne puis dans des bidonvilles, j’ai été confrontée à la dure réalité du terrain et j’ai pu identifier les besoins de la population, sans pour autant pouvoir remédier à la situation. À la veille de mon départ, des Philippins avec qui je travaillais m’ont demandé de les aider à trouver du financement en France pour leur permettre d’aider davantage d’enfants et de familles en détresse. J’ai accepté de relever le défi. C’est précisément parce que la demande venait d’eux que j’ai dit oui, malgré mon manque de compétence et d’expérience. Ensemble, nous avons conçu un projet concret. J’ai entrepris une étude de faisabilité et élaboré un plan de financement de l’opération : construire une maison d’accueil pour les filles des rues. Lorsque j’ai pris conscience de la souffrance des jeunes filles abusées aux Philippines, et que je me suis engagée à leurs côtés, je ne savais pas encore que cela bouleverserait ma vie… Je souhaitais avant tout briser le cercle vicieux de la maltraitance et de l’exclusion, notamment envers les plus fragiles, les femmes et les enfants.

J’ai officiellement créé l’association Caméléon aux Philippines, en 1997, pour venir en aide aux petites et jeunes filles, victimes de maltraitance et d’abus sexuels. J’ai vécu sur le terrain pendant plus de dix ans en ayant toujours en tête de partir et de laisser “mon bébé” aux mains des Philippins, car c’était ma vision du développement. Durant toutes ces années, j’ai répété à l’équipe locale que j’allais m’en aller et qu’elle devait s’approprier le projet. Mon plus grand succès fut précisément le jour de mon départ, lorsque j’ai laissé les rênes aux Philippins.

Aujourd’hui à la tête de Caméléon France, je vis à Paris mais je partage mon temps entre les différentes antennes de l’association que j’ai mises en place en France, en Suisse et au Luxembourg. Je continue d’effectuer régulièrement des missions aux Philippines pour assurer le développement et la pérennité des programmes, sans pour autant avoir un rôle de direction. L’équipe est entièrement philippine. Quoi qu’il m’arrive, Caméléon survivra et les étincelles que nous avons allumées dans les yeux et le coeur des enfants continueront de briller. Et ces jeunes filles deviendront des femmes épanouies et heureuses.

Le nom de l’association est porteur des symboles auxquels je suis attachée. Le caméléon représente la puissance de la transformation. Les jeunes filles accueillies s’adaptent à un nouvel environnement en changeant de couleur, en changeant de vie… Comme le caméléon, elles avancent doucement, basculent de temps en temps mais ne tombent pas. Caméléon redonne des couleurs à leur avenir. Nous aidons les jeunes victimes à retrouver les gestes de l’enfance, à reprendre confiance en elles, à se reconstruire, à (re)vivre, et nous les préparons pour leur futur professionnel. La grande famille Caméléon, c’est aujourd’hui plus de 650 enfants sorties de leur chrysalide pour s’envoler de leurs propres ailes…»

Message : À vous, femmes du monde, qui souhaitez tendre la main pour aider ou être aidées, dites-vous que ce premier geste représente le pas le plus important vers la liberté d’agir, de penser et d’aimer. Il ne pourra vous apporter que le meilleur…

Extrait du livre Femmes du Monde, Mères du Nouveau Monde, par Véronique Cloitre, (Éditions Dangles, 2014)

www.cameleon-association.org/